Partie 3 : Kosen rufu et la paix mondiale
Chapitre 25: L’unité selon le principe de « différents par le corps, un en esprit » [25.3]

25.3 Respecter chacun comme s’il s’agissait d’un bouddha

Ici, le président Ikeda explique l’importance capitale de l’unité et souligne la nécessité de se respecter mutuellement en tant que bouddhas et d’agir en harmonie au sein de l’organisation dédiée à kosen rufu, en nous fondant sur notre noble cause commune.

Nichiren a choisi les mots « différents par le corps, un en esprit » pour illustrer le type d’unité dans laquelle l’individualité de chacun est valorisée et peut pleinement s’exprimer. « Différents par le corps, un en esprit » est certainement le principe structurel le plus élevé ; cela revient à reconnaître la valeur de chaque individu et à lui permettre de pleinement développer son potentiel.

« Différents par le corps » reflète l’idée selon laquelle chacun de nous possède une mission, des talents et un ensemble de conditions de vie uniques.

« Un en esprit » signifie que, tout en vivant en accord avec notre individualité, nous devons rester unis en esprit.

En revanche, l’expression « différents par le corps, différents en esprit » décrit une situation de division totale.

Par ailleurs, l’expression « un par le corps, un en esprit » renvoie à un contexte dans lequel la pensée de groupe passe au premier plan, l’individualité est ignorée et où, en fin de compte, le totalitarisme s’installe. Cette situation ne permet pas aux individus d’exprimer leurs compétences propres.

Tout le monde, sans exception, a une mission à accomplir. Chaque individu possède un potentiel énorme. Comment permettre à chacun de le concrétiser ? Quand une personne accomplit sa révolution humaine, elle insuffle à d’autres du courage et de l’espoir. Elle leur donne confiance. De l’inspiration naît l’inspiration, et ce sentiment déclenche ainsi une réaction en chaîne de personne à personne, qui génère une extraordinaire dynamique de changement.

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Nichiren encourageait toujours ses disciples à entretenir de bonnes relations entre eux et à se soutenir mutuellement.

D’après le post-scriptum de la lettre Le pratiquant du Sûtra du Lotus rencontrera des persécutions (Écrits, 452), il semble que les disciples de Nichiren se réunissaient régulièrement pour lire ses lettres, étudier ses enseignements et discuter du sens de l’atteinte de la bouddhéité en cette vie et de la manière de faire avancer kosen rufu. Ces rassemblements étaient donc tout à fait comparables aux réunions de discussion et de préparation qui sont organisées dans la Soka Gakkai de nos jours.

Nous ne pouvons pas poursuivre la pratique bouddhique en restant isolés. Car, comme Nichiren l’écrit, « […] les vents de la gloire et du profit soufflent violemment et la lampe de la pratique bouddhique est facilement éteinte. » (Écrits, 1038) Il est vital que nous nous encouragions et nous soutenions les uns les autres tout en allant de l’avant. Nous devrions être des influences positives, ou « amis de bien », les uns pour les autres.

La pratique bouddhique est une lutte constante contre les obstacles et les forces démoniaques. Nous devons donc continuer de pratiquer le bouddhisme dans ce monde où les influences négatives abondent.

Aujourd’hui, nous poursuivons notre pratique bouddhique jour après jour en tant que personnes ordinaires, en faisant briller notre humanité avec éclat, sans nous laisser perturber par les influences négatives qui se manifestent autour de nous. De ce fait, nous sommes comparables aux fleurs de lotus décrites dans le Sûtra du Lotus, qui s’épanouissent sans être souillées par l’eau boueuse dans laquelle elles poussent (cf. SdL-XV, 215). Il n’existe pas d’autre moyen d’atteindre la bouddhéité. C’est pourquoi faire partie d’un tel rassemblement d’« amis de bien » est inestimable et nous permet d’accomplir notre pratique bouddhique avec succès.

Être unis autour d’un objectif commun d’une grande noblesse est déterminant. La précieuse organisation de kosen rufu ne doit absolument jamais être détruite. Toute construction nécessite des efforts tenaces et laborieux, alors qu’il ne faut qu’un instant pour tout détruire.

À titre d’exemple, la lutte menée par les frères Munenaka et Munenaga Ikegami illustre clairement l’importance de l’unité. Comme vous le savez sans doute, leur père Yasumitsu avait déshérité l’aîné, Munenaka [en raison de sa foi dans le bouddhisme de Nichiren], et cette décision avait été prise sous l’influence du moine Ryokan1 du temple Gokuraku-ji.

Après avoir déshérité son fils aîné, Yasumitsu tenta de faire de son fils cadet Munenaga le chef de famille. Munenaga ne savait plus quelle direction prendre : fallait-il accepter l’offre de son père ou suivre la voie de la foi ? Après avoir reçu un encouragement de Nichiren, il agit de concert avec son frère aîné.

Nichiren avait clairement compris que l’unité était la clé pour que les frères Ikegami relèvent avec succès le défi auquel ils étaient confrontés. Il leur apprit qu’ils pourraient vaincre les fonctions démoniaques en s’alliant, aux côtés de leurs épouses, pour présenter un front uni. Nichiren termine la Lettre aux deux frères Ikegami en les invitant instamment à créer une forte unité entre eux.

Dans tout groupe de personnes quel qu’il soit, il y en aura toujours que nous aimons bien et avec lesquelles nous nous entendons, et d’autres que nous n’apprécions pas particulièrement et qui ne sont pas véritablement nos amis. En un sens, c’est tout à fait normal d’éprouver de tels sentiments en tant qu’êtres humains, et nous ne devrions pas nous en inquiéter. Pour autant, il est insensé d’être ballottés par nos goûts et nos aversions personnels au point de faiblir dans notre pratique bouddhique. Agir de la sorte ouvre une brèche à travers laquelle les fonctions démoniaques peuvent s’engouffrer, en faisant de nous leur proie.

C’est pourquoi Nichiren met sévèrement en garde ses disciples contre la calomnie à l’encontre des autres pratiquants. Il écrit : « Même si vous n’en avez pas envie, vous devriez vous lier d’amitié avec eux. » (Écrits, 857) ; « Même s’ils ont des défauts, si ceux-ci sont mineurs, faites comme si vous ne les aviez pas remarqués. » (WND-II, 731) ; et « […] restez en bons termes avec ceux qui croient en cet enseignement, sans [chercher à] voir, ni à entendre, ni à souligner quoi que ce soit en eux qui pourrait vous déplaire. » (Écrits, 917)

Nous sommes tous bouddhas. Par conséquent, critiquer l’un d’entre nous revient à critiquer un bouddha. Et, parce que nous sommes tous bouddhas, nous devrions nous respecter. Il est important que dans la Soka Gakkai brille l’esprit décrit par ce passage : « […] tu devras te lever et la saluer de très loin, en lui montrant autant de respect que s’il s’agissait d’un bouddha. » (SdL-XXVIII, 303)

Nichiren déclare même que, lorsque les gens prennent l’habitude de critiquer les autres, ils « ne se départissent jamais de cette attitude erronée, si bien qu’ils semblent voués aux voies mauvaises ». (Écrits, 762) C’est pourquoi il écrit : « Vous devriez vous respecter mutuellement [en tant que bouddhas]. » (Ibid.) Il affirme aussi que nous devrions bien nous entendre, comme Shakyamuni et Maints-Trésors, qui, dans le chapitre « L’apparition de la Tour aux trésors » (11e) du Sûtra du Lotus, partagent le même siège.

L’important est d’avoir une foi tournée vers la réalisation de kosen rufu. Quand nous déployons des efforts sincères pour kosen rufu, nous n’avons pas le temps de nous quereller. Nichiren réprimande à maintes reprises les pratiquants qui sont assez insensés pour se quereller sous les yeux de l’ennemi. Il compare cela à l’attitude de « la bécassine et du crustacé », que le pêcheur attrape ensemble tant ils sont empêtrés dans leur lutte (cf. WND-II, 914). Nous devrions pouvoir nous parler et discuter de tout avec franchise, en nous fondant sur notre engagement commun pour kosen rufu.

Quelle que soit la situation, le dialogue constitue une démarche positive. Dialoguer construit la solidarité et crée la cohésion. Refuser d’engager le dialogue est néfaste en ce sens que cela peut devenir un élément de division et de destruction. Il convient donc de se rencontrer pour dialoguer. Il est tout à fait naturel d’avoir parfois un point de vue différent des autres. Mais le dialogue fait naître la confiance, même parmi ceux qui ne sont pas d’accord. Dans la société aussi, le dialogue représente le fondement de la paix, tandis que le rejet du dialogue ouvre la porte au conflit et à la guerre.

Nichiren exhortait toujours ses disciples à engager le dialogue et à développer l’unité selon le principe de « différents par le corps, un en esprit ». Il écrit : « […] même un inconnu, si vous lui ouvrez votre cœur, peut avoir le désir de donner sa vie pour vous. » (Écrits, 448) ; et « Invitez instamment tous les pratiquants de Suruga [la région dans laquelle se situe Atsuhara] à rester unis dans leur foi ! » (WND-II, 572) On trouve en effet de nombreuses déclarations à ce sujet dans les écrits de Nichiren.

Il écrit aussi : « Vous devriez toujours parler ensemble pour vous libérer des souffrances des naissances et des morts et atteindre la terre pure du pic de l’Aigle, où, en vous approuvant mutuellement, vous parlerez d’un même esprit. » (Écrits, 919)

En fin de compte, les liens entre amis pratiquants, qui ont agi ensemble pour faire avancer kosen rufu, sont éternels. Il vous arrive peut-être parfois de penser : « Une vie entière avec cette personne, ça suffit largement ! » Mais l’important est de continuer d’œuvrer avec de telles personnes afin de radicalement transformer notre état de vie. Comme Nichiren l’écrit : « Vous vous êtes lié à un ami dans la chambre des orchidées et vous vous êtes redressé comme l’armoise poussant parmi le chanvre2. » (Écrits, 25) Le fait est que les gens changent. Et, si nous ne changions par pour le meilleur, quel serait l’intérêt de notre pratique bouddhique ? Nichiren déclare aussi : « La colombe s’est changée en épervier, le moineau en palourde3. » (Ibid.)

En tant qu’amis pratiquants qui gardent la Loi merveilleuse, nous devons absolument nous respecter mutuellement. Nous devons nous encourager tout en allant de l’avant sur la longue et périlleuse voie de kosen rufu. Nous devons avancer dans l’unité, selon le principe de « différents par le corps, un en esprit », en étant des « amis de bien » les uns pour les autres.

D’après Gosho no sekai (Le Monde du Gosho), vol. 1, publié en japonais en juin 2003

La sagesse pour créer le bonheur et la paix est une compilation des écrits de Daisaku Ikeda sur une base thématique.

  • *1Ryokan : également connu sous le nom de Ninsho, Ryokan était un moine de l’école Shingon-Ritsu au Japon. Sous le patronage du clan Hojo, il devint le moine principal du temple Gokuraku-ji à Kamakura. En s’attirant les faveurs de représentants du gouvernement, il obtint des postes importants et lucratifs. Hostile à Nichiren, il a activement conspiré avec les autorités pour faire persécuter ce dernier, ainsi que ses disciples.
  • *2« Un ami dans la chambre des orchidées » désigne une personne de vertu. Cela signifie que la compagnie d’une telle personne de vertu exerce une bonne influence, comme le fait d’entrer dans une pièce remplie d’orchidées nous imprègne de leur parfum. On dit par ailleurs que, lorsque l’armoise est soutenue par le chanvre, elle pousse droit.
  • *3Ces expressions provenant de la littérature chinoise ancienne illustrent l’idée de changements radicaux.